Saarana pour Orgue

Dédicace "à Carson P. Cooman"

Composé : Mai 2005

Première: 24 juillet, 2005 St. Thomas Episcopal, Rochester, NY USA Carson P. Cooman, orgue

J’ai mis longtemps avant d’écrire pour orgue. Peut-être est-ce du, paradoxalement, à mes origines. Étant pour ainsi dire "né dans un orgue" je connais tellement bien la machine et ses divers avatars, que devoir faire un choix d’esthétique entre les deux instruments mythiques que je côtoyai dans ma prime jeunesse, à savoir le merveilleux Clicquot de Poitiers et le non moins remarquable Cavaillé de Notre- Dame de Paris, me paraissait impossible...

Comme souvent, la chose s’est débloquée, et je crois avoir trouvé avec ces pièces ( Dialogue sur les pleins jeux et Saarana) une sorte de prise en compte d’éléments syncrétiques tout en évitant les compromis. J’ai ainsi fait en sorte que les registrations soient faisables sur le plus d’orgues possibles, et que jamais le discours musical au demeurant très classique n’impose définitivement un timbre ou un autre. Il s’agit donc le plus souvent de plans sonores bien différenciés : à l’interprète la responsabilité de trouver sur l’orgue du jour les timbres qui conviendront le mieux en fonction de l’instrument, de l’acoustique et de son humeur d’organiste... On peut donc jouer ces pièces sur un orgue néoclassique, romantique ou symphonique, seul un orgue accordé au tempérament inégal conduirait inexorablement à la catastrophe...

Saarana est une pièce d’inspiration romantique, une sorte de rhapsodie faite de "sensibilités successives" , d’humeurs, dans laquelle se côtoient des sentiments multiples et fort contradictoires... C’est un peu une "tranche de vie", mélancolique, ou d’une grande gaîté, drôle, souvent violente, toujours un peu excessive et ce, tout en restant concise et distanciée, dans les limites de la "bonne éducation" et de la courtoisie musicale... On peut si l’on sait faire, exprimer bien des excès sans le moindre mot qui choque... Je crois à la vertu du décalage.

J.T.Boisseau